Intolérance au gluten, sensibilité au gluten qui est réellement concerné ?

Ce que je vais écrire dans les prochaines lignes est totalement neuf et encore sujet à polémique, Ne comptez pas trouver ces informations dans la presse généraliste. En effet si vous mangez sans gluten sans être malade coeliaque vous être considéré comme un original au mieux, comme un malade imaginaire au pire.

Petit florilège de titre d’articles parus dans la presse française en 2013 : dans le Magazine du Monde (1) un article intitulé « les croisés du gluten », avec un surtitre « Petites névroses modernes » ou encore dans le Figaro « intolérance au gluten : gare aux mauvais diagnostics ». Pas évident de manger sans-gluten de nos jours vous risquez d’être comparés à des fanatiques religieux et vous vous exposez à des mises en garde sévères. 

Vous n’êtes pas fou !

Je tiens à rassurer toutes les personnes qui tirent des bénéfices d’une alimentation sans gluten même sans avoir été diagnostiquées coeliaques. La sensibilité au gluten existe : vous n’êtes pas fou, orthorexique ou un « snob du sans gluten ».

La sensibilité au gluten est différente de la maladie coeliaque. La sensibilité au gluten non-coeliaque peut affecter presque tous les systèmes de votre corps, les symptômes comprennent des effets digestifs, des problèmes de peau tels que des éruptions cutanées, le « brouillard de cerveau », des douleurs articulaires et des engourdissements dans les extrémités et des symptômes neurologiques telles que des migraines… Ma liste n’est pas exhaustive, mais on comprend vite qu’il est difficile de poser un diagnostic avec une telle palette de symptômes. Au final, combien de personnes sont réellement concernées par le sans gluten ?

Des estimations qui vont de 6% à 50 % de la population

Autant les statistiques de la maladie cœliaque ou intolérance au gluten sont bien connues, on estime à 1 % la population touchée autant sur la sensibilité au gluten qui est quelque chose de différent les spécialistes ne sont pas du tout d’accord. Les estimations s’étendent sur des fourchettes très larges.

Selon le Dr Alessio FASANO, directeur du Centre de Recherche de la maladie coeliaque de l’université du Maryland, 6 à 7 % de la population pourrait être touchée.

Le Dr Rodney FORD, pédiatre à Christchurch en Nouvelle-Zélande et auteur du livre «The Gluten Syndrome », va même encore plus loin, il estime que le pourcentage de la population touchée serait entre 30 % et 50 %.

Enfin, le Dr Dr. Kenneth Fine qui a fondé et dirige une société de test à la sensibilité au gluten (Entorelab) estime-lui que le chiffre tourne autour des 50 %.

Vous l’aurez compris il y a boire et à manger en matière de statistiques, cela veut dire que la recherche dans le domaine n’est pas encore stabilisée. Il faut retenir que globalement le chiffre des personnes sensibles au gluten serait bien supérieur à celui des coeliaques à savoir 1 % de la population.

Faut-il appliquer le principe de précaution ?

C’est à chacun de décider en son âme et conscience. Tout ce que je peux dire c’est qu’en l’état de la science actuelle ne pas être testé positif à la maladie coeliaque n’est pas une garantie que vous n’ayez pas de problème avec le gluten.

Aujourd’hui, il n’existe pas encore de tests biologiques fiables pour affirmer qu’une personne est sensible au gluten. Les chercheurs attendent la découverte d’un biomarqueur qui renseignerait avec certitude le malade s’il a un problème avec le gluten. Il se peut que cette découverte prenne encore un peu de temps.

Mon avis sur la question, c’est que si vous répondez positivement à un régime d’ éviction du gluten, autrement dit si le fait d’éliminer le gluten de votre alimentation vous apporte une amélioration de votre qualité de vie et de votre santé , n’attendez pas que les tests pour les personnes sensibles au gluten arrivent sur le marché.

Il faut 17 ans en moyenne pour qu’une découverte scientifique franchisse le seuil du cabinet médical

Pour terminer je voulais citer cette étude édifiante (1), de Zoë Slote Morris du Institute of Public Health à l’Université de Cambridge , Steven Wooding et Jonathan Grant du RAND Europe à Cambridge. Ces chercheurs se sont intéressés au temps qu’il faut pour qu’une découverte scientifique trouve une application médicale directe. La réponse est en moyenne 17 ans.

Cette durée est parfois justifiée, car il faut que la recherche soit éprouvée, de plus une recherche théorique n’a pas forcément d’application pratique directe. Malheureusement dans la plupart des cas c’est une mauvaise translation de l’information scientifique, ce qui est plus dramatique, car il s’agit de beaucoup de temps perdu pour les malades.

En la matière dans le « sans-gluten » nous en sommes là, les découvertes scientifiques commencent à être faites, même intuitivement vous pouvez constater que de plus en plus de personnes dans votre entourage sont sensibles au gluten, mais il faudra encore quelques années pour que toutes les personnes concernées puissent être aidées et que le corps médical soit formé.

Sources :

(1) Le Magazine du Monde – 20 juillet 2013
(2) le Figaro – 24 juin 2013
(3) The answer is 17 years, what is the question: understanding time lags in translational research

source: greenescape