Des molécules chimiques toxiques dans les produits pour bébés

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Les tétines, couches, tapis de sol ou bodys sont-ils aussi inoffensifs qu’ils n’y paraissent ? En testant en laboratoire 68 produits pour bébés, l’UFC Que Choisir révèle dans un communiqué que plus d’un sur six contient des perturbateurs endocriniens. Ces molécules chimiques, telles que les phtalates ou le bisphénol A, perturbent le système hormonal et peuvent avoir des effets très nocifs sur l’organisme, même à faible dose : malformations des organes sexuels, puberté précoce, diabète, cancers…

Si l’Union européenne interdit depuis mars 2011 la production de biberons contenant du bisphénol A, l’UFC Que Choisir estime « qu’une interdiction plus large s’impose pour prendre en compte les risques significatifs que constituent les autres objets présents dans l’environnement immédiat du bébé (matelas à langer, tapis de sol …) qui selon le cas peuvent être portés à la bouche ou sont en contact prolongé avec la peau ».

Contre-attaque des entreprises incriminées

L’association de consommateurs pointe notamment du doigt la tétine « Hello Kitty », qui contiendrait du bisphénol A, malgré l’interdiction. « Nous avons lancé des expertises pour comprendre l’origine d’une éventuelle contamination, a réagi la marque Tigex qui fabrique ces tétines (marque de la société Allègre Puériculture, basée à Saint-Étienne). Les résultats, provenant du laboratoire indépendant SGS situé en Allemagne, établissent qu’aucune trace de Bisphénol n’est détectable dans les sucettes Hello Kitty qui ont été analysées. » La marque affirme que le produit est fabriqué en polypropylène et silicone, « deux matériaux qui ne contiennent pas, par nature, de Bisphénol A ».

Suite aux tests menés par l’UFC Que Choisir, le matelas à langer ‘Babycalin’ a aussi écopé de la mention « ne pas acheter ». Il contiendrait un retardateur de flamme chloré à une teneur trente fois supérieure au maximum autorisé par la réglementation. « Nos produits sont tout à fait conformes à la réglementation en vigueur, réagit le responsable qualité des produits Babycalin. Les matelas à langer n’étant pas des jouets mais des articles de puériculture, ces valeurs spécifiques ne s’appliquent pas » [1]. La marque Babycalin a par ailleurs indiqué que le produit testé n’est plus fabriqué, mais s’engage à la mise en place d’un plan d’action avec le fournisseur pour « vérifier la non-utilisation de retardateurs de flamme chlorés sur leurs produits ».

Une réglementation obsolète

Ces résultats révèlent, selon l’UFC Que Choisir, une réglementation encadrant les perturbateurs endocriniens « inadaptée à l’enjeu sanitaire ». Celle-ci ne porte que sur un très faible échantillon des perturbateurs endocriniens identifiés par les experts (nos précédents articles). « Une interdiction pure et simple devrait être la règle pour tous les perturbateurs endocriniens », affirme l’association qui demande aux législateurs français et européens d’adopter sans délai une réglementation bien plus ambitieuse, en particulier pour les produits destinés aux enfants.

Les récent signaux envoyés par l’Europe sont assez mauvais en la matière. Dans un rapport publié le 21 janvier, l’Autorité européenne pour la sécurité des aliments (Efsa) a dédouané le bisphénol A, assurant qu’il ne posait pas de risque pour la santé des consommateurs de tous les groupes d’âge. L’Association européenne de l’industrie plastique a immédiatement exprimé sa satisfaction, appelant dans la foulée à une annulation des « restrictions françaises disproportionnées ». Depuis le 1er janvier, la France a en effet interdit le Bisphénol A dans tous les contenants alimentaires. Ségolène Royal a déclaré que le ministère de l’Écologie allait faire expertiser l’avis de l’Efsa, « pour voir si le poids des lobbys n’est pas intervenu dans sa publication ». La route menant à une réglementation plus stricte des perturbateurs endocriniens est plus que jamais semée d’embûches.

@Sophie_Chapelle

Mise à jour de l’article le 17 février 2015 suite à la réaction du responsable qualité de la marque Babycalin.

Aller plus loin, nos entretiens :
- avec le toxicologue André Cicolella : Cancers, diabète, obésité : « La croissance des maladies liées à notre mode de vie met en péril notre système de santé »
- avec le journaliste Fabrice Nicolino : « Face à l’industrie chimique, tout le monde est tétanisé »

Notes

[1] La marque Babycalin précise que « le retardateur de flamme chloré détecté par UFC Que Choisir est du TCPP (CAS 13674-84-5) à hauteur de 163 mg/kg. Il n’y a actuellement pas de règlementation limitant l’usage du TCPP sur ce matelas à langer qui est un article de puériculture (que ce soit le règlement REACH ou la liste candidate de l’ECHA). »

Source : Bastamag